Cette parabole étrange nous raconte l’histoire de 10 jeunes filles qui nous représentent. Les unes sont insouciantes et les autres prévoyantes. Que veut dire pour notre existence être prévoyant ? Puisque la prévoyance est symbolisée par l’huile, 5 jeunes filles ont des flacons d’huile, 5 autres non, de quoi l’huile est-elle le symbole ?
Commençons (comme pour résoudre une équation) à regarder ce que nous comprenons.
Toutes les jeunes filles sont invitées à des noces. Une noce, c’est une fête, c’est un moment de joie où tout le monde se retrouve pour célébrer l’amour entre deux personnes qui s’engagent l’une envers l’amour. L’enjeu, c’est l’amour, vivre dans une relation heureuse avec l’autre.
Mais l’époux tarde. Aimer a à voir avec le temps dans notre existence. Le temps, c’est ce qui dure, c’est aussi ce qui est incertain. C’est la condition de notre existence. C’est parce que nous vivons et que nous aimons dans le temps qu’il faut être prévoyant.
Nous savons aussi que tout le monde est invité aux noces donc à aimer. Nous savons que les 10 jeunes filles dorment. Cela signifie que nous pouvons tous être fatigués et dormir. Fatigués parfois d’aimer mais aussi déçus, mais aussi en échec. La lampe peut s’éteindre…
Mais quand l’époux vient, que le moment, le temps, se présentent, il faut se réveiller. Tout le monde peut se réveiller. Les 10 jeunes filles se réveillent. Tout le monde peut allumer sa lampe et suivre l’époux mais il faut de l’huile pour tenir sa lampe allumée et le suivre. Traduisons, il faut de l’huile pour tenir sa lampe allumée et aimer.
Dernière information, l’huile dépend de chacun. Personne ne peut prévoir l’huile à ma place. Par conséquent, quelle dimension de mon existence est-elle le symbole ?
La foi ou l’espérance ? Peut-être mais n’est-ce pas la lampe qui est le symbole de la foi et de l’espérance ? …
La fidélité. Oui mais à quoi ? A un engagement ? Mais la parabole précise que toutes les jeunes filles se sont endormies. Notre lampe peut s’éteindre. Quelle est cette huile qui permettra de la rallumer ?
En posant cette question à des personnes âgées d’une maison de retraite qui font l’expérience du temps qui dure, du temps qui est incertain, l’une a spontanément répondu la parole. Et puis nous avons parlé de la prière.
A la question de savoir ce que symbolise l’huile, je propose la prière. Pourquoi ?
Ayons à l’esprit que Jésus nous demande de prier sans cesse, de toujours demander quoi qu’il arrive, quoi qu’il se passe. Interprétant cet enseignement de Jésus, voilà ce qu’ont dit trois personnes qui sont importantes dans notre tradition.
La première est Basile de Césarée. Il a vécu au IVe siècle. Il écrit dans une règle pour les moines : « C'est Dieu qui a mis en nous le désir de l'aimer. »
Donc prier pour renouveler le désir d’aimer. C’est ce que dit saint Augustin un peu plus tard : « À quoi bon nous disperser de tous côtés et chercher ce que nous devons demander dans la prière ? Disons plutôt avec le psaume : La seule chose que je demande au Seigneur, que je cherche, c'est d'habiter la maison du Seigneur tous les jours de ma vie, pour savourer la douceur du Seigneur et fréquenter son temple. Là, en effet, tous les désirs ne passent pas en arrivant et en disparaissant, et l'un ne commence pas quand l'autre finit : ils existent tous ensemble, ils n'ont pas de fin…, car la vie elle-même, dont ils sont les jours, n'a pas de fin… Pour nous faire obtenir cette vie bienheureuse, celui qui en personne est la Vie véritable nous a enseigné à prier, non pas avec un flot de paroles…Il sait ce qui nous est nécessaire avant que nous le lui demandions ? Alors, pourquoi nous exhorte-t-il à la prière continuelle ? Cela pourrait nous étonner, mais nous devons comprendre que Dieu notre Seigneur ne veut pas être informé de notre désir, qu'il ne peut ignorer. Mais il veut que notre désir s'excite par la prière, afin que nous soyons capables d'accueillir ce qu'il s'apprête à nous donner. »
Prier, excité le désir d’aimer…
Le dernier s’appelle Anselme de Cantorbéry. Il a vécu au XIe siècle. Voilà ce qu’il écrit :
« Allons, courage, pauvre homme ! Fuis un peu tes occupations, dérobe-toi un moment au tumulte de tes pensées. Rejette maintenant tes lourds soucis et laisse de côté tes tracas. Donne un petit instant à Dieu et repose-toi un peu en lui. Entre dans la chambre de ton esprit, bannis-en tout, sauf Dieu ou ce qui peut t'aider à le chercher. Ferme la porte et mets-toi à sa recherche. »
Je sais que vous vous demandez malgré ce que dit la parabole si nous ne pouvons pas faire quelque chose pour les 5 jeunes filles qui n’ont pas d’huile… Pour reprendre le livre de la sagesse, 1ère lecture, nous pouvons être le visage souriant de la sagesse qui va et vient à notre recherche.
Je vous fais entendre les mots d’un visage, d’une personne que nous connaissons bien et sur laquelle vient d’être réalisé un film, l’abbé Pierre :
« Je continuerai à croire, même si tout le monde perd espoir.
Je continuerai à aimer, même si les autres distillent la haine.
Je continuerai à construire, même si les autres détruisent.
Je continuerai à parler de paix, même au milieu d’une guerre.
Je continuerai à illuminer, même au milieu de l’obscurité.
Je continuerai à semer, même si les autres piétinent la récolte.
Et je continuerai à crier, même si les autres se taisent. »
Et je dessinerai des sourires sur des visages en larmes.
Et j’apporterai le soulagement, quand on verra la douleur.
Et j’offrirai des motifs de joie là où il n’y a que tristesse.
J’inviterai à marcher celui qui a décidé de s’arrêter…
Et je tendrai les bras à ceux qui se sentent épuisés.
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