Homélie de Bruno Millevoye, 12e dimanche du temps ordinaire, 25 juin 2023
(Point de méthode) Pour préparer la liturgie, nous avons lu les 4 textes les uns après les autres en prenant notre temps mais sans commentaire. Ensuite, chacun a pu s’exprimer. Les premières réactions ont été plus que mitigées : le péché qui entre dans le monde, les dénonciations, les insultes dont Jérémie est victime, périr dans la géhenne. La fin de l’évangile nous a particulièrement surpris : Jésus qui renie ceux qui le renient. Nous voilà revenus au temps du « œil pour œil, dent pour dent. »
Nous ne nous sommes pas découragés et avons continué à partager. Et nous avons bien fait car nous avons entendu cette volonté positive qui traverse ces textes. « Ne craignez pas. », « Le Seigneur a délivré le malheureux de la main des méchants. » « Répons-moi Seigneur car il est bon ton amour. »
Tout a pris plus de sens quand nous avons mis l’évangile dans l’ensemble du chapitre 10. Jésus envoie ses disciples en mission. Tout ce qui est dit a pour enjeu de pouvoir vivre cette mission. Il s’agit par conséquent de regarder en face ce que veut dire s’engager à témoigner de l’évangile, regarder en face ce que veut dire être responsable qu’on a une éthique, qu’on ne veut pas faire les choses n’importe comment. Agir, c’est s’exposer, faire face à des adversaires, possiblement vivre des situations conflictuelles douloureuses. Et cela l’objet de ce chapitre 10.
Nous avons continué notre échange. Entre autres, nous avons relevé ce qui touche à la vérité : « Rien n’est voilé qui ne sera dévoilé… Dites-le en pleine lumière. » Cela peut nous faire réfléchir. Comment ce que nous pensons, ce que nous disons, ce que nous faisons, ce que nous vivons est vrai ou tend à la vérité.
Nous avons noté que nous avions de la valeur aux yeux du Père. « Vous valez bien plus qu’une multitude de moineaux. »
Il a été plus difficile de digérer l’attitude de Jésus à l’égard de ceux qui le renient. Après notre rencontre, j’ai pensé au fait que nous n’osons pas, parfois ou souvent, parler de Jésus, dire que nous sommes chrétiens. Je sais que c’est par discrétion, par respect des convictions des autres, par souci du vivre ensemble, parce que nous ne voulons pas nous confondre avec des témoignages de foi qui nous paraissent excessifs ou même qui sont contraires à ce que nous pensons. Alors j’ai imaginé que Jésus soit là, parmi nous, que nous fassions comme s’il n’était pas là. J’ai imaginé qu’il dise alors : « Je vous dérange. » L’emploi de ce verbe renier est, je pense, l’occasion de faire le point sur la façon vivre notre foi. Est-ce que le Christ me fait vivre ? Si oui alors, nous pouvons méditer le verset : « ce que vous entendez au creux de l’oreille, proclamez-le sur les toits. »
Pour reprendre tout cela, j’ai imaginé un bateau. C’est bientôt les vacances, la mer…
Il s’agit d’un monocoque, c’est plus simple. Un bateau a besoin d’une quille, c’est à dire d’un lest. Il ne se voit pas mais sans quille, le bateau va se retourner. J’ai imaginé que ce lest soit le fait de se déclarer pour Jésus devant les hommes. Pour dire autrement notre foi.
Pour avancer, notre bateau a besoin d’une voile mais il faut la monter. C’est mieux quand il y en a deux, une grand-voile et un foc. J’ai imaginé que ces voiles soient comme la vérité, notre volonté de dire et de vivre en pleine lumière. Si nous cachons la vérité, si nous ne montons pas la voile, le bateau ne peut pas avancer.
Enfin, pour tenir au-dessus de l’eau, le bateau a besoin d’une coque. Sans coque, le bateau n’existe pas. Il y a toutes sortes de coques, des petites, des grandes, des arrondies, des fines. Mais l’important, c’est que le coque soit en bon état. J’ai imaginé qu’elle soit notre valeur aux yeux de Dieu…
Je vous invite à laisser parler votre imagination. Une paroissienne de Saint-Alban m’a dit à la sortie de la messe : « l’Esprit Saint, c’est le vent qui permet au bateau d’avancer. » Quand le vent vient de l’arrière, qu’il porte le bateau, on ne sent pas le vent et la voile semble ne servir à rien. La quille a moins d’importance. Quand le vent est de face, il faut alors tirer des bords. Sans quille, c’est impossible d’avancer. Il va aussi falloir border la voile, par conséquent, être ferme dans ses convictions pour reprendre ma comparaison avec la vérité et la coque va recevoir des chocs. Mais peu importe puisqu’elle a de la valeur….
Pour terminer, je vous lis le verset qui précède le passage de l’évangile que nous avons entendu : « Le disciple n’est pas au-dessus de son maître, ni le serviteur au-dessus de son seigneur. Il suffit que le disciple soit comme son maître, et le serviteur, comme son seigneur. »
Cette mention peut nous paraître anodine. Sauf que, finalement, astucieusement, l’évangile nous dit que notre mesure, c’est Jésus-Christ, en toute circonstance et simplement, le Christ. Il ne s’agit donc pas de le renier. Il ne s’agit pas non plus de nous imaginer plus fort que lui, ni de penser que nous pourrions faire autrement. Il s’agit de nous ajuster à lui, qu’il y ait la tempête ou le calme plat. Et une façon de nous ajuster à lui est de prier comme lui le Père. Tout cet évangile sur la mission et donc l’action est précédée par un appel à la prière : « Priez donc le maître. » Comme Jésus, avec Jésus, prions le Père qui a tout pouvoir.
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