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Bruno Lachnitt

Homélie de Bruno Lachnitt, diacre pour la veillée de Noël

Pour permettre à ces textes et à cette fête de Noël de résonner en nous, je voudrais m’arrêter sur trois mots ce soir. Le premier mot, c’est « promesse ». Certains d’entre nous avons été scouts, certains peut-être le sont encore, et c’est un mot qui parle sûrement pour ceux-là mais pas seulement pour eux. Dans notre vie on nous a sans doute fait des promesses qui n’ont pas été tenues. Nous même en avons sûrement faites que nous n’avons pas tenues. Et notre vie peut ressembler parfois à une promesse non tenue. Mais ce soir, affirmer que la vie est une promesse, c’est oser croire qu’elle est un cadeau et que ce cadeau nous vient d’un amour absolu et inconditionnel. La Bonne Nouvelle que nous recevons ce soir, c’est que Dieu est lui-même la promesse qui ne saurait nous décevoir. C’est à cet acte de foi que l’évangile nous invite : oser l’espérance, accueillir la venue de Dieu comme un don qui ne nous décevra pas.

La promesse est souvent liée à l’annonce d’un enfant, dans la Bible comme dans nos vies. L'arrivée d'un enfant est toujours une raison d'espérer. Nous nous penchons sur son berceau comme autant de bonnes fées qui font vœu pour le nouveau-né d'une réussite que nous voulons croire encore possible pour lui plus qu'elle ne l'a été pour nous. Est-ce pour cela que nous adhérons si facilement à l'espérance de Noël. Riches et pauvres, savants ou ignorants, si peu férus de théologie que nous soyons, la crèche nous parle tous au cœur d'une espérance à laquelle nous voudrions croire.

Alors le deuxième mot c’est « enfantement ». Car si l’enfant évoque la promesse, l’enfantement évoque aussi la souffrance. Marie a-t-elle souffert ? L’histoire ne le dit pas, mais il est sûr qu’elle n’a pas eu de péridurale ! L’enfantement est une image que nous utilisons pour dire une joie qui vient au terme d’une épreuve. Et ce monde qui nous entoure est en souffrance et nous ne le regardons peut-être pas toujours comme porteur d’une promesse. C’est aussi ce à quoi nous sommes invités ce soir : lire les signes des temps comme un commencement, veiller au cœur de l’urgence et voir le monde en enfantement ! L’espérance est un combat, la petite fille espérance comme disait Péguy est fragile, et si nous sommes appelés à en être les témoins ce n’est pas par naïveté dans un monde bisounours. C’est au cœur des douleurs de ce monde que nous sommes invités à nous tenir comme des veilleurs pour y discerner les signes de Celui qui vient, porter un regard de sage-femme sur ce monde en souffrance, je le disais il y a deux semaines.

Mais nous sommes peut-être trop habitués à ce que nous fêtons ce soir pour être percutés par l’inouï de cette nouvelle : Dieu vient à nous dans notre chair ! Et cette venue transfigure notre exil (pour reprendre une image biblique) en lieu de résidence de ce Dieu qui nous semblait si loin, inaccessible, indifférent au vacarme des bruits de bottes évoqués en première lecture par Isaïe. Dieu en notre chair, c’est l’histoire sainte du vieux testament qui devient prémices d’une alliance nouvelle dont aucune trahison ne pourra avoir raison. Dieu en notre chair, c’est l’histoire de chacun de nous qui devient une histoire sainte. Mais c’est à la lumière de Pâques que nous considérons cette naissance, et si personne n’avait témoigné de la résurrection de ce Jésus crucifié sous Ponce-Pilate, l’événement de sa naissance n’aurait guère d’intérêt aujourd’hui. Alors, éclairée par l’événement de la résurrection, l’enfantement de Celui en qui s’accomplit la promesse est le germe en ce monde d’une espérance folle. Et le signe donné aux bergers dans une mangeoire, indique déjà que l’abaissement de Dieu va le conduire jusqu’à se faire nourriture pour nous.

Alors le troisième mot, c’est « paix ». On l’appellera « prince de la paix » nous disait le texte d’Isaïe. Qui de nous n’aspire pas à la paix quand les bruits de bottes et de bombes sont si proches de nous ? La paix dans nos maisons, dans nos familles, la paix sociale, la paix entre les peuples, mais peut-être d’abord avant tout cela, et pour tout cela, la paix du cœur, la paix intérieure. Car si nous aspirons à la paix, nous prenons souvent des chemins qui nous en éloignent. La paix ne s’impose pas par la force. La paix ne s’achète pas avec de l’argent. La paix ne se démontre pas, elle s’enfante. Et Dieu est lui-même la Paix que nous désirons au plus profond de nous. Alors considérons ce soir la crèche, non pas comme un beau conte pour enfants, mais en perspective du mystère de Pâques pour y découvrir Dieu qui vient à nous fragile et vulnérable, Dieu dans une mangeoire : enfantement qui est promesse de paix. S’il n’est finalement qu’une chose à retenir de cette révélation, c’est que c’est à nous qu’il revient dans la douceur, l’humilité et la pauvreté de mettre Dieu au monde !

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